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Tout ceci est parfaitement vrai. On pourra toujours dire que les chiffres du chômage sont manipulés par le jeu des radiations administratives (voir autre papier) mais : 1/ cela ne jouerait que marginalement sur le taux observé, 2/ cela jouerait dans le sens d'une atténuation de l'ampleur du problème (or c'est l'argument inverse qui est utilisé). Plus que de la manipulation des chiffres, le diagnostic gouvernemental relève de la manipulation des cerveaux (disponibles)! En effet, une telle présentation est parfaitement malhonnête. Pourquoi ? Parce qu'elle présente sur une même série des données qui ne sont pas comparables. Le taux de chômage des moins de 25 ans ne peut être comparé au taux de chômage des plus de 25 ans dans la mesure où les populations de référence sont totalement hétérogènes. Le taux de chômage se définit comme le rapport du nombre de chômeurs par la population active. La question qu'il faut donc se poser est de savoir combien représentent les chômeurs "jeunes" et combien représentent la population active "jeune" ? Or toute une partie de la population des jeunes est scolarisée et, à ce titre tenue pour "inactive" dans les statistiques (même si un étudiant travaille ici ou là, il sera considéré comme inactif). Le taux de chômage des jeunes est donc le rapport du nombre de jeunes au chômage sur une population active très réduite dans la mesure où elle ne prend pas en compte les jeunes scolarisés. |
![]() Le graphique ci-dessus montre qu'il y a 609 000 jeunes chômeurs sur 7 833 709 jeunes ! |
Cela ne veut pas dire que le chômage des jeunes ne soit pas une réalité. Cela veut simplement dire que le taux de chômage des jeunes ne peut pas être comparé à celui des plus de 25 ans et qu'il est malhonnête de construire des schémas comme celui que fournit le communiqué de presse du premier ministre. Cela n'a AUCUN sens. Le taux de chômage des jeunes n'a de sens que quand on prend en compte la composition de la population active "jeunes". Au Royaume-Uni par exemple le taux de chômage des jeunes est deux fois moins élevé qu'en France. En 2004, le taux de chômage s'élevait à 12,1% au Royaume Uni contre 22,0% en France (source : Eurostat). Est-ce que cela veut dire qu'il y a deux fois plus de jeunes au chômage en France qu'au Royaume-Uni ? Non ! La proportion de jeunes au chômage est assez proche dans les deux pays : 7,6% au Royaume-Uni, 8,1% en France. D'où vient cette différence ? La différence s'explique en premier lieu par le fait que les jeunes britanniques sont plus nombreux se trouver dans la catégorie "actifs" alors que les jeunes français sont plus nombreux à être scolarisés donc classés dans la catégorie "inactifs". En d'autres termes, si on mettait toute la jeunesse hors des facs pour la faire entrer sur le marché du travail, il y a fort à parier que le taux de chômage des jeunes baisserait aussi rapidement qu'artificiellement. Enfin, pour répondre à l'argument selon lequel nous serions champions d'Europe du chômage des jeunes, il faut noter qu'avec 8,1% de jeunes au chômage la France se situe dans la moyenne des 25 de l'Union Européenne (8,2%). (source Eurostat, http://www.insee.fr/fr/ffc/chifcle_fiche.asp?ref_id=CMPTEF03310&tab_id=191). On peut donc se demander si le "chômage des jeunes" est un phénomène spécifique qu'il faut traiter spécifiquement. Il y a des jeunes au chômage, comme il y a des "vieux" (de plus de 25 ans) au chômage. La différence de taux de chômage observée entre ces deux groupes tient moins à la "jeunesse" des "jeunes" qu'au fait qu'ils sont massivement scolarisés… Mais le procédé rhétorique du chômage des jeunes reste bien utile pour grignoter le droit du travail et des salariés de ce pays, là où ils sont les plus fragiles. |
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